Wir fahren auf der Autobahn
Un électronique « Autobahn » grésille des enceintes de ma voiture. Quoi de plus adapté que ce morceau du génial groupe Allemand Kraftwerk pour empiler les 700 kilomètres devant me mener à la frontière Autrichienne ? Le pilote Bavarois Valentin Grobauer m’avait indiqué il y a quelques jours qu’il me serait plus judicieux de partir la veille de cette course à Pocking afin d’éviter sur l’A99 les cohortes de Bmw Touring et autres Break VW partis à la chasse aux œufs de Pâques en Bavière et en Autriche.
Cela fait une quarantaine d’années que je traverse l’Allemagne, l’Autriche et la Hongrie. D’abord installé dans un landau, bien peinard sur la banquette arrière en skaï noir de la Renault 16 de mon père puis ce fût en Sochalienne 504 et 505 jusqu’au jour où, le permis en poche, je pris la route afin de couvrir les 1600 km séparant ma Lorraine de Miskolc en Hongrie, située non loin de la frontière Ukrainienne à bord de ma modeste Opel Corsa. La nuit, je redoutais le passage des teutoniques Porsche, Bmw et des « Kolossales » Mercedes : me doublant telles des Heinkel UHU en chasse dans un lourd vrombissement. Ma guimbarde embarquée dans leur souffle, swinguait alors frénétiquement tel un zazou dans une cave de Saint-Germain-des-Prés…
Servus Bavaria !
Durant ces quarante dernières années, je n’ai que très rarement rencontré des rubans de goudron désert en Allemagne. Ce fut le cas ce week-end. Ayant suivi le conseil de Valentin, je suis arrivé à Munich des samedi soir sans encombre. Ils sont marrant ces Bavarois. Tel un Diesel, ils ont du mal à démarrer puis la confiance installée, ils débordent de chaleurs en vous accueillant avec un traditionnel « Grrrrrüss gott » ou un « Serrrrrvus », une Helles im Glas à la main. En fin de soirée, quelques minutes à regarder perplexe à la téloche, « Deutschland sucht den Superstar » on suffit pour confier ma nuit à Nyx.
Pocking ?
Après la matinale rencontre avec l’ami ricoré, j’ai pris la route menant à Pocking, petite ville située à quelques kilomètres de la frontière Autrichienne. Paradoxalement, la quasi-totalité des pilotes de cette course n’ont jamais tourné sur cette piste. Pourtant l’anneau de Pocking, est une très belle et grande piste. Pocking est une piste légendaire. Le Rothal Stadium (stade accueillant la piste) fut construit au lendemain de la deuxième guerre mondiale.
Entre les années 60 et 70, le Msc Pocking, a organisé des courses sur son anneau de Longtracks de 750 mètres. Puis dans les années 80, Pocking, après avoir modifié le tracé de sa piste a accueilli des courses de speedway. Une inscription sur l’un des bâtiments, rappel que la finale du championnat du monde 1993 s’est déroulée sur cette piste Bavaroise avec des pilotes tels que Sam Ermolenko, Tomasz Gollob, Hans Nielsen, Per Jonsson, Leigh Adams, Erik Gundersen, Greg Hancock ou un certain Armando Castagna… Vous avez dit Castagna ?…
Un imbroglio juridique contraint le club à ne pouvoir organiser que deux évènements pas an. L’an dernier, en raison de la pluie tombée en Avril, le club a ouvert : 0 jour…(0 virgule 0 Monsieur Blutarsky…) Cette situation impact lourdement le club : impossibilité de participer à la Buli (Bundesliga), impossibilité de participer à la Team Cup, impossibilité d’organiser des entrainements. Imaginez la frustration des pilotes habitant à moins de cinq minutes de la piste devant faire plusieurs centaine de kilomètres pour s’entrainer. Non, ceci n’est pas un exemple d’abus de droit.
C’est le jeune Marc Herter qui m’a accueilli sur le parking du circuit. La veille, il a participé à une course de juniors durant laquelle il a récolté 7 points. Très cordialement, il me propose de boire un jus. Je reconnais quelques membres du club de Diedenbergen. Cela me fait plaisir de les voir. Nous parlons chiffons methanolés durant quelques instants avant que je rejoigne les paddocks afin de récupérer mon laissez-passer. Quelques pilotes sont déjà présents : Valentin Grobauer, Martin Smolinski, Stephan Katt, ainsi que l’Italien Paco Castagna. Je salue Johannes Grobauer ainsi que Valentin. Il a remporté la veille une course junior haut la main. Johannes (merci à lui) me tend mon bracelet rose fluo me permettant de circuler librement dans l’enceinte du club.
Je me dirige vers la piste afin de l’observer et de connaitre l’état de sa surface. Le Samedi la pluie a trempé la piste mais un vent assez fort a réussit à sécher celle-ci. La matière est assez bien tassée tout en restant tout de même relativement meuble. Pocking est une piste de 400 mètres munie de deux courbes d’environ 17 mètres de large et de deux lignes droites d’environ 90 mètres et de 10 mètres de large.
Habitant à moins de cinq minutes de la piste, Valentin Grobauer se devait d’être présent à Pocking. La veille, Valentin a remporté (3,3,3,3,3) la course U21 organisée par le club de Pocking. Setups parfait alors, Valentin m’a indiqué que ses départs étaient impeccables. 24 heures plus tard, Valentin a connu des problèmes dans ses réglages le pénalisant lourdement dans ses départs. Afin de trouver une solution, il a alors tenté d’adopter différents réglages (rapports de pignons) en vain. Avec seulement 5 petits points (1,1,2,1,0,0) récoltés, cette journée sera certainement pour lui à oublier rapidement.
Les cloches de Rome :
Le sympathique Paco Castagna est là. Pour ce petit gars originaire d’Italie du nord, le sourire n’est pas une option. Cela fait plusieurs fois que je le croise sur différentes pistes Européennes. A chaque fois Paco à la banane. Le speedway semble être pour lui avant tout un plaisir. Il a répondu à l’invitation du club de Pocking. J’évoque avec lui sa première manche du championnat Italien de cette année au cours de laquelle, il a terminé à une excellente 3 ieme place.
L’un des membres de la course procède à la vérification de ses machines. L’examinateur est intrigué par les jantes (fabricant Italien Kineo) de Paco avec rayonnage externe et non interne. « Ma ché ! elles sont chââârmantes mes jolies jantéééés ».
Je plaisante avec Paco sur ses moteurs Jawa JRM en lui indiquant que probablement dès l’année prochaine, il sera le dernier pilote à utiliser des Jawa en sus et lieu des GM Italiens. Il sourit et m’informe que même Nicolas Vicentin commence à utiliser des GM Italiens. Je jette un coup d’œil en dessous des protections moteurs : Elise et Azure sont inscrits sur ses moteurs. Paco perpétue cette tradition qu’adoptent quelques pilotes en baptisant leurs moteurs d’un prénom afin de les reconnaitre.
Je demande à Paco s’il a pu faire un essai avec sa machine le matin. Il me répond par la négative: sa première manche fera office de galop d’essai. La récolte de la « châtaigne » (Castagna en Italien) fut très bonne avec 13 points (2,3,3,2,0,3). Paco fût l’un des acteurs volontaires de cette journée. Menant de belles manches, se jouant des Dupont et Dupond Allemand (Mark et Erik Riss), de Valentin Grobauer ou même de l’expérimenté Stefan Katt.
Pour cette course, Paco a sorti le « matos » des grands jours en ayant monté son système de blocage de suspension lors des départ (système Speedway Start System de Tomasin R&D utilisé un temps par Tai Woffinden). Afin d’armer telle une arbalète son bidule, Paco de manière très étrange donnait l’impression de grimper sur sa fourche avant chaque manche.
L’attitude de Paco sur ses machines en courbe me suggère le style du Suédois Andreas Jonsson. Plutôt grand, Paco adopte dans les courbes une position droite en laissant trainer en arrière sa semelle de fer. Il est bien possible que Paco soit avec Nicolas Vicentin présent à la ½ finale du championnat d’Europe U21 à Mâcon le 14 juin prochain…
Jésus Christ superstar
Le fils « prodige » de la nation Allemande est là. Malgré son accession au championnat du monde, Martin a pris le temps de venir à Pocking. Son stand, astucieusement décoré tel le stand d’un camelot de foire, est déployé en un temps record. Martin a déjà couru la veille à Landshut (Landshut vs Brokstedt). Sa victoire au grand prix de Nouvelle-Zélande n’a pas gonflé la tête de Smoli. Pour preuve, à la demande d’une famille, Smoli est sorti du club de Pocking afin de se diriger sur le parking pour apposer sa signature sur une photo fixée sur un camping car. Voyez-vous un autre pilote de Grand Prix faire ceci ?
Martin promeut avec bonheur le speedway qu’il affectionne tant. Les fans aiment Smoli. Smoli aime ses fans. Certains fans de Smoli n’ont pas hésité à se faire tatouer des « Smolis en roue arrière » sur les biscotos. Je dois vous le confesser, j’ai longtemps hésité à me faire tatouer la cueillette des olives en Basse-Provence tant cette dernière me ravit aussi. Martin s’est montré avenant avec ses fans de 7 à 77 ans : n’hésitant pas signer des autographes et faire des photos avec des fillettes quasi en transe ou de porter l’accolade aux personnes qu’il affectionne. E,U,I,A,L,T,R,S,M Bertrand Renard une suggestion ? Et bien en 9 lettres nous avons ALTRUISME…
Smoli est venu avec deux machines ressemblant fort à ses machines de grand prix. Sur le côté gauche de ses guidons, on retrouve une bague en plastique munie de deux boutons pilotant son allumage. C’est ce dispositif qui a déclenché la réprobation des 15 autres coureurs de grand prix à l’égard de Smoli. Ces derniers voient en ce dispositif un élément irrégulier dotant le team #84 d’un avantage non négligeable. En effet, les deux boutons permettent en cours de course à Martin de faire varier les réglages de son allumage lui permettant ainsi d’obtenir deux comportant distincts pour son moteur.
Ainsi, en fonction de la stratégie choisie durant une manche (et non plus juste avant une manche), Martin peu adapter ses réglages afin d’être plus à l’aise soit en intérieur de courbe, soit en extérieur. Wunderbar ! J’avais il y a quelques mois parcouru le règlement de la FIM 2014 et notamment la partie consacrée à la gestion de l’allumage. « Tiens, ils ouvrent le règlement en permettant l’usage de l’asservissement électronique de l’allumage tout en interdisant toujours la télémétrie me suis-je dit alors ». J’avoue avoir souri à la lecture de ce paragraphe très équivoque car non explicite (expliciter n’étant pas expliquer).
Est-ce que cet interrupteur apporte un avantage au Team de Smoli : oui. Martin est il un petit filou ? Non pas du tout. La démarche du Team 84 est même plutôt fine et très pro. Une lecture attentive du règlement de la Fim ainsi qu’une ingénierie correcte a permis au team de proposer une avancée technique cohérente et conforme.
Nda : Depuis le GP de Nouvelle-Zélande, la FIM a fignolé sont règlement. Dorénavant la variation des réglages de l’allumage durant une manche n’est pas permise. Cela signifie que Smoli peut toujours avoir un interrupteur (sous sa selle par exemple) qu’il ne peut utiliser durant une manche. Ceci n’a pas empêché Martin d’accéder au semi-finale avec 7 points lors du deuxième GP à Bromberg.
Pour ce qui est de la prestation de Martin à Pocking, je ne ferais pas offense à Martin en indiquant qu’il a assuré ses manches sans forcer. Il a dominé l’ensemble de ses manches outrageusement. Le Bavarois est un cran au-dessus, nettement au-dessus tout en assurant le SAV à grand renforts de wheeling et autres cabrioles sur sa machine.
Sur le papier, la sélection de pilotes Allemands devait l’emporter face à la sélection de pilotes Européens composée de pilotes d’un niveau plutôt moyen. Le score final ne laisse aucun doute : 77 points pour l’Allemagne, et 48 maigres points pour le team Europa.
Il est bien rare qu’une sélection Allemande « mette » dans la sacoche près d’une trentaine de points à une équipe étrangère. Certes Smoli est ses copains on remporté la médaille d’or au dernier European best pairs sur la singulière piste Allemande d’Herxheim. La course de Pocking fut une course agréable à suivre. Sans enjeu, elle a peut-être manqué d’intensité dans les combats. Néanmoins, des pilotes comme l’Allemand Micchi Härtel, l’Italien Paco Castagna ou encore le Polonais Karol Zabik on proposés quelques beaux combats.
Indestructible
A noter la présence du petit Karol Zabik,champion d’Europe U19 2005, champion du monde junior en 2006 et triple champion du monde U21 par équipe 2005, 2006 et 2007. Depuis 2006 Karol a subit plusieurs crashs sévères avec perte de connaissance, traumatismes crâniens, multiples fractures etc. Ce pilote d’élite Polonaise est un survivant. La sagesse devrait l’inciter à se retirer, le moindre nouveau crash pouvant lui être fatal. Pourtant Karol n’est pas venue à Pocking pour beurrer des sandwichs. Doté d’un niveau bien supérieur aux pilotes Allemands (excepté Smoli peut être), Zabik s’est livré à des chasses appuyées sur quelques pilotes comme l’un des frère Riss qui a subit les assauts du Polonais : l’ensemble des spectateurs ayant retenu leur souffle lorsque la roue avant du Polonais est venue toucher la roue arrière de la machine du frérot Riss… La catastrophe n’était pas très loin.
J’allais oublier, avant de reprendre la route, un rapide passage sous le chapiteau Graf Arco (petite brasserie Bavaroise située à Eichendorf-Adldorf) afin de redonner mon « Pfandmarke » ticket de consigne de ma Radler…